Théodore Reinach, l'homme qui a fait revivre la Grèce antique à la villa Kérylos

4,1 / 5 (101 votes) Publié le 25 Jan 2024 Lecture 6 minutes
Théodore Reinach, l_homme qui a fait revivre la Grèce antique à la villa Kérylos

Théodore Reinach, né le 3 juillet 1860 à Saint-Germain-en-Laye et mort le 28 octobre 1928 à Paris, est un archéologue, mécène et homme politique français, qui a consacré sa vie à l'étude et à la diffusion de la civilisation hellénistique. Passionné par la Grèce antique, il a réalisé son rêve en construisant la Villa Kérylos, une reconstitution fidèle d'une demeure grecque du IIe siècle av. J.-C., sur un promontoire rocheux surplombant la Méditerranée, à Beaulieu-sur-Mer. La Villa Kérylos est aujourd'hui un musée, qui témoigne de la richesse et de la diversité de la culture grecque, ainsi que de la personnalité et des goûts de son fondateur.

Un savant aux multiples talents

Théodore Reinach est issu d'une famille de banquiers juifs originaires de Francfort-sur-le-Main, qui se sont installés en France au début du XIXe siècle. Il est le plus jeune des trois frères Reinach, surnommés par les chansonniers « les frères Je-Sais-Tout », en raison de leurs talents et de leurs connaissances dans de nombreux domaines. Théodore Reinach fait preuve d'une précocité et d'une intelligence exceptionnelles. Élève au lycée Condorcet, il cumule le plus grand nombre de prix (19) obtenus au concours général, dans des disciplines aussi variées que la géographie, l'anglais, la version grecque, la géométrie, l'histoire, la philosophie ou la physique-chimie. Très jeune, il est titulaire de deux doctorats, en droit et en lettres.

De 1881 à 1886, il est avocat au barreau de Paris, mais il se consacre surtout à ses recherches personnelles, dans des domaines aussi divers que les mathématiques, la musique, l'histoire, la philologie, l'épigraphie, la numismatique ou l'archéologie. Il publie de nombreux articles et ouvrages, qui font autorité dans leur domaine. Il est notamment reconnu comme un spécialiste de l'histoire de la Grèce antique, et plus particulièrement de l'époque hellénistique, qui s'étend du IVe au Ier siècle av. J.-C. Il écrit des biographies de personnages illustres, comme Mithridate Eupator, le roi du Pont, ou Démétrios Poliorcète, le roi de Macédoine. Il étudie également les institutions, les religions, les arts et les sciences de la Grèce antique, en s'appuyant sur les sources littéraires, les inscriptions, les monnaies et les vestiges archéologiques.

En 1890, il est envoyé en mission archéologique à Constantinople, où il découvre et déchiffre des papyrus grecs, qui contiennent des textes inédits d'auteurs anciens, comme Aristote, Ménandre ou Théophraste. Il publie ces textes, accompagnés de traductions et de commentaires, dans la collection des Papyrus grecs d'Égypte, qu'il dirige avec son frère Salomon. Il participe également à des fouilles archéologiques en Grèce, en Asie Mineure et en Égypte, où il met au jour des monuments, des sculptures, des fresques et des objets d'art, qui enrichissent sa connaissance de la civilisation grecque.

En 1894, il devient maître de conférences de numismatique ancienne à la Sorbonne. En 1903, il est nommé directeur d'études d'histoire des religions à l'École pratique des hautes études. En 1909, il est élu à l'Académie des inscriptions et belles-lettres. En 1924, il devient professeur de numismatique au Collège de France. Il préside également plusieurs sociétés savantes, comme la Société de linguistique de Paris, la Société des études juives ou la Société française de musicologie. Il reçoit de nombreuses distinctions, comme le prix Bordin de l'Académie française, la médaille de la Royal Numismatic Society ou la Légion d'honneur.

Un mécène généreux

Théodore Reinach est aussi un mécène, qui soutient financièrement et moralement de nombreuses causes et initiatives culturelles. Il fait don de ses collections personnelles de livres, de manuscrits, de monnaies, de papyrus, de sculptures et de peintures à diverses institutions, comme la Bibliothèque nationale, le Cabinet des médailles, le Musée du Louvre ou le Musée Unterlinden de Colmar. Il finance également des fouilles archéologiques, des publications scientifiques, des bourses d'études, des concerts, des expositions et des monuments commémoratifs. Il est notamment à l'origine de la création du Musée des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, du Musée des instruments de musique de Paris, du Monument aux morts de La Motte-Servolex ou du Monument à Théophile Gautier à Tarbes.

Théodore Reinach est également un homme engagé, qui défend des idées progressistes et humanistes. Il milite pour la laïcité, l'éducation, la justice sociale, la paix, le droit des femmes et le droit des minorités. Il est l'un des fondateurs de la Ligue des droits de l'homme, de la Ligue de l'enseignement, de la Ligue française pour la défense des droits des femmes ou de l'Union libérale israélite de France. Il est également un ardent défenseur de la cause arménienne, et dénonce les massacres perpétrés par les Turcs à l'encontre des Arméniens. Il est l'un des premiers à reconnaître le génocide arménien, et à réclamer une intervention internationale pour protéger les victimes.

Un homme politique modéré

Théodore Reinach est aussi un homme politique, qui s'engage dans la vie publique à partir de 1906. Il se présente aux élections législatives dans la circonscription de Chambéry, en Savoie, où il possède un château à La Motte-Servolex. Il est élu député, sous l'étiquette des radicaux indépendants, et siège au sein du Bloc des gauches. Il est réélu en 1910 et en 1914. Il se distingue par son activité parlementaire, et intervient sur des sujets variés, comme l'éducation, la culture, la fiscalité, la diplomatie, la défense ou la colonisation. Il est notamment rapporteur du budget de l'instruction publique, et défend des mesures en faveur de l'enseignement primaire, secondaire et supérieur. Il est également membre de la commission des affaires étrangères, et s'intéresse aux questions relatives à la Grèce, à la Turquie, à l'Arménie, à l'Égypte ou à la Chine.

Pendant la Première Guerre mondiale, Théodore Reinach soutient l'effort de guerre, et participe à des missions diplomatiques aux États-Unis, en Grèce et en Égypte. Il est favorable à la participation des États-Unis à la guerre, et à la création d'une Société des Nations. Il est également partisan d'une politique de réconciliation avec l'Allemagne, et s'oppose au traité de Versailles, qu'il juge trop sévère. Il se retire de la vie politique en 1919, et se consacre à ses travaux scientifiques et à ses activités culturelles.

Un rêveur épris de Grèce antique

Théodore Reinach est un amoureux de la Grèce antique, qu'il considère comme le berceau de la civilisation occidentale. Il est fasciné par la beauté et la sagesse des Grecs anciens, qui ont développé l'art, la philosophie, la science, la démocratie et les jeux olympiques. Il rêve de visiter la Grèce, mais il ne peut pas réaliser son projet, à cause des troubles politiques qui secouent le pays. Il décide alors de créer sa propre Grèce, en construisant la Villa Kérylos, une reconstitution fidèle d'une demeure grecque du IIe siècle av. J.-C., sur un promontoire rocheux surplombant la Méditerranée, à Beaulieu-sur-Mer.

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La Villa Kérylos est le fruit de la collaboration entre Théodore Reinach et Emmanuel Pontremoli, un architecte et archéologue français, qui partage sa passion pour la Grèce antique. Les deux hommes s'inspirent des descriptions littéraires, des plans archéologiques et des vestiges existants, pour concevoir la villa, qui respecte les principes architecturaux, les matériaux et les éléments décoratifs des maisons grecques. La villa est construite entre 1902 et 1908, et est meublée et décorée avec soin, avec des objets d'art, des fresques, des mosaïques et des sculptures, qui évoquent la culture et la mythologie grecques.

La Villa Kérylos est un lieu de vie et de culture, où Théodore Reinach et sa famille reçoivent de nombreux invités prestigieux, comme des savants, des artistes, des écrivains, des politiciens ou des personnalités royales. La villa est également un lieu d'étude et de recherche, où Théodore Reinach poursuit ses travaux sur la civilisation hellénistique, et où il crée une bibliothèque, qui contient plus de 10 000 ouvrages sur la Grèce antique. La villa est enfin un lieu de rêve et de plaisir, où Théodore Reinach profite de la beauté du paysage, du climat et de la mer, et où il se sent proche des Grecs anciens, qu'il admire tant.

Théodore Reinach meurt en 1928, à l'âge de 68 ans, à Paris. Il lègue la Villa Kérylos à l'Institut de France, à condition qu'elle soit ouverte au public, et qu'elle conserve son aspect d'origine. La Villa Kérylos est aujourd'hui un musée, qui accueille des visiteurs du monde entier, qui viennent admirer la beauté et la sagesse de la Grèce antique, à travers la vision et le goût de Théodore Reinach.

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